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Londres

En ce mercredi d'août 2012, la nuit est tombée à Londres depuis quelques heures déjà. Devant le stade, sous une chaleur étouffante, l’attente est longue pour Cécile Demaude. Pourtant, comme toute l’équipe de France paralympique, elle n’est arrivée dans la capitale anglaise que la veille. Mais entre sa sortie du train et le début de cette cérémonie d’ouverture, les minutes sont devenues des heures.

 

 

Les nations entrent dans l’arène une à une. Ethiopie, Fidji, Finlande… France. C’est maintenant. Devant des milliers de spectateurs et face à un brouhaha presque assourdissant, Cécile s’élance avec les 153 autres athlètes français. Dans sa tête, les images et les souvenirs défilent à une vitesse folle : son lit d’hôpital, ceux qui ne croyaient pas en elle, son premier entraînement d’escrime, tous ses sacrifices…

C’est sa revanche.

« Une petite fille pleine de vie, qui avait toujours le sourire. » Voilà les premiers mots des parents de Cécile pour la définir. Sa naissance, le 1er juin 1972 en région parisienne, leur procure un immense bonheur. Identique à celui ressenti deux ans plus tôt pour l’ainé, Xavier. Comme tous frères et soeurs, ils se chamaillent. Mais quand il faut l’aider ou la défendre en public, il est le premier à répondre présent : « Il était vraiment protecteur », se souvient Denise, leur mère. Rapidement, la famille s’installe à Marolles-en-Hurepoix, dans l’Essonne. Cécile y est très heureuse et attrape ce que son frère appelle le "sirop de la rue". « C’était une chipie, elle était toujours dehors à jouer avec ses copines, la première à sortir, la dernière à rentrer », confirment ses parents. Leur fille passe aussi beaucoup de temps à faire du sport, notamment du tennis de table, qui lui permet de se défouler et extérioriser toute son énergie.

 

 

À l’école, c’est plus compliqué. Sa dyslexie la gêne énormément et les heures passées à faire et refaire ses exercices n’y changent rien. La situation s’aggrave davantage après la mutation de son père au Brésil. Cécile n’accroche pas du tout avec la méthode enseignée et, pendant près d’un an, accumule un retard conséquent. Un passage de sa scolarité dont elle garde un très mauvais souvenir. « Ça a été extrêmement dur, elle était constamment en d’échec », confient ses parents. Malgré tout, leur fille ne lâche rien et décroche quelques années plus tard son brevet. Mais elle est perdue : « Je ne voulais pas aller en seconde. Le collège me laissait donc le choix entre un CAP d’horlogerie et un BEP d’optique. » Après réflexion, Cécile opte pour le BEP et rejoint alors le lycée Fresnel, à Paris.

 

 

C’est à ce moment-là que le déclic intervient. « J’ai eu mon BAFA et, en côtoyant le handicap mental, ça a été comme une révélation. C’était clair dans ma tête, je voulais être éducatrice spécialisée », explique celle qui n’a alors que 17 ans. C’est notamment une rencontre avec un jeune trisomique qui la marque énormément. Malgré une mononucléose quelques mois avant son bac, Cécile s’accroche et l’obtient, avant de réussir l’année suivante ses concours. « On n’a pas vraiment été surpris. Quand elle veut quelque chose, elle l’a », assure son père. Admise à l’Institut de Formation en Travail Social (IFTS) à Grenoble, elle quitte pour la première fois le cocon familial et prend son indépendance.

 

 

Son école lui demande un investissement conséquent et Cécile travaille parfois très tard le soir. Mais elle a besoin de retrouver ce qu’elle vivait avec les jeunes quand elle encadrait des colonies. Les autres, c’est son moteur. Alors elle s’investit auprès d’Elan 2, une association qui prend en charge des personnes handicapées. En semaine ou le week-end, la jeune femme donne sans compter. Sa mère avait déjà remarqué cette facette de sa personnalité : « Petite, elle allait toujours voir les autres, elle les aidait, elle s’intéressait. »

 

 

À l’issue de ses études et une fois son diplôme obtenu, Cécile rentre à Paris. Elle est cette fois embauchée dans un institut médico-éducatif (IME) qui accueille des jeunes filles en difficulté, tant sur le plan scolaire que familial. Avec toujours cette volonté de découvrir de nouvelles choses, et d’être présente pour ceux qui en ont besoin. Pleinement épanouie dans son quotidien, Cécile n’aura malheureusement pas le temps d’en profiter.


LA RENAISSANCE

Palmarès


Six fois championne de France
en épée et au fleuret (de 2011 à 2016)


Vice championne d’Europe (au fleuret en 2011) et six fois médaillée d’argent lors d’étapes de Coupe du Monde (en 2009, 2015, 2012, 2013, 2x2017)


Six fois médaillée de bronze lors d’étapes de Coupe du Monde
(en 2010, 3x2011, 2013 et 2014)


Trois participations aux Championnats du Monde (fleuret + épée en 2011, 2013 et 2015)


Deux participations
aux Jeux Paralympiques
(épée à Londres en 2012
+ épée et fleuret à Rio en 2016)

Cécile Demaude

LE DOUBLE
COMBAT

L’histoire d’une athlète handisport
qui lutte au quotidien. Dans la vie,
face à sa maladie, et sur la piste d’escrime face à ses adversaires.

Quelques mois seulement après avoir commencé sa nouvelle mission, Cécile apprend qu’elle doit se faire opérer de la vésicule biliaire. Une intervention censée être bégnine. Elle concerne plus de 80 000 personnes en France chaque année. « L’histoire devait être vite réglée et la vie devait reprendre son cours », précise la jeune femme.

 

 

Pourtant, au réveil, les douleurs sont vives, surtout au niveau des abdominaux. Rien d’alarmant pour ses médecins. Selon eux, c’est une brûlure post-opératoire de l’estomac, récurrente chez de nombreux patients. Cécile accepte donc de partir en vacances avec des amis. Au lieu de profiter, elle va subir. À son retour, elle tente tout de même de reprendre le travail. Mais c’est impossible. Son état s’aggrave et elle perd 20 kilos en l’espace de quelques mois. « À partir de ce moment là, ça a été une descente aux enfers. Ma main ne s’ouvrait plus et mon pied partait en varus équin », confie-t-elle. Cécile est alors placée en psychiatrie, les médecins pensent qu’elle fait une conversion hystérique : son corps s’exprimerait à la place de son esprit. « Je souffrais. Je me suis dit que s’ils avaient raison, ça me permettrait d’aller mieux », reconnait-elle. Finalement, aucun problème psychologique n’est décelé mais cette période reste malgré tout très douloureuse pour ses parents. « On m’a même demandé si je ne battais pas ma fille », précise son père.

 

 

Peu de temps après, la situation de Cécile empire, notamment son pied, qui enfle de jour en jour : « Une interne m’a dit que ça n’était pas grave, que ça allait passer. Personnellement, je sentais bien qu’il y avait quelque chose. » C’est en fin de compte une infirmière qui lui diagnostique une phlébite et commande en urgence un eccho doppler. « Le caillou de sang était gros comme une balle de golf. À deux heures près, j’étais morte », raconte-t-elle aujourd’hui, encore émue. Par la suite, Cécile alterne entre séjours chez ses parents et en maisons de rééducation où elle fait la rencontre d’Éric. Le coup de coeur est réciproque. Au-delà des sentiments, ils partagent la souffrance. La jeune femme quitte alors celui qui l’accompagnait à l’époque : « Il m’avait connu avant tous mes problèmes, j’avais peur que ça ne fonctionne plus. »

 

 

Petit à petit, tout le côté droit du corps de Cécile est paralysé. Jusqu’au jour où elle ne peut plus tenir debout. Longtemps, des médecins lui promettent qu’elle pourra marcher à nouveau. Pourtant, les mois passent, et rien ne change. Seule la morphine la soulage quand les douleurs sont trop vives. Certaines nuits, elle pense même au suicide. 

 

 

Mais en 1999, alors qu’elle n’a que 27 ans, la jeune femme se rend à l’évidence, elle devra passer le restant de ses jours en fauteuil roulant. La même année, une rencontre avec un neurologue lui apporte tout de même des précisions sur son cas. Elle souffre d’une forme de sclérose en plaque, avec des symptômes de dystonie. À l’époque, en France, ils ne sont que huit à avoir des signaux similaires, synonymes d’une maladie très rare. Ce n’est pas tout. Cécile apprend surtout que sa moelle épinière a été touchée durant l’opération, deux ans plus tôt. Pour autant, elle ne veut pas en savoir plus : « À un moment donné, j’ai décidé d’arrêter de chercher les causes de mes souffrances et de vivre. » 

 

 

Pour sa famille, sa maladie est un mystère. « On n’a jamais compris ce qu’il s’est passé. Encore maintenant, on ne comprend pas », confie son frère, Xavier. Ce qui ne l’empêche pas, avec ses parents, d’avoir toujours été très présent pour elle : « Sans eux, je ne serai sûrement plus
là »,
reconnaît Cécile.

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CécileFauteuil

JE ME SUIS DIT :
SOIT JE MEURS,
SOIT JE VIS COMME ÇA

«

»

1

2

3

4


Champ visuel réduit


Douleurs et spasmes des muscles
+ insensibilité de la peau + incapacité à tendre le bras 


Mobile grâce aux injections de botox


Douleurs et spasmes des muscles
+ insensibilité de la peau


Pied bot varus équin


Douleurs


Abdos en spasmes constants 

1972

1974

1989

1993

1996

1997

Naît à Maison-Alfort
(Val de Marne)

Déménage à Marolles-
en-Hurepoix (Essonne)

Obtient son BAFA

Revient
en région parisienne

Est embauchée en Institut médico-éducatif

Réussit son concours d'éducatrice spécialisée
et part étudier à Grenoble

LES 25 PREMIÈRES ANNÉES DE CÈCILE :

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Cécile enfant

L'INSOUCIANCE

Survolez les points pour en savoir plus sur les douleurs de Cécile

À son retour en France, l’escrimeuse a besoin de changement. Plus précisément, elle veut s’installer dans la région lyonnaise. Les raisons sont familiales : son frère vit à Villeurbanne. Mais ce n’est pas le seul élément. « Sur une compétition internationale, j’avais fait la rencontre d’un arbitre, Guillaume Dubreuil. Je savais qu’il avait monté une section escrime handisport au club du Masque de Fer à Lyon. Il y a tout de suite eu un bon feeling entre nous. Quelques semaines plus tard, je lui ai demandé s’il était prêt à m’accompagner pour atteindre mon objectif : me qualifier pour les Jeux Paralympiques de Rio », confie-t-elle. Guillaume accepte sans même réfléchir : « Pour moi, c’était une opportunité unique. Travailler avec une athlète qui sort des Jeux, ça ne se refuse pas. » Mais Cécile ne veut pas quitter Paris sans être sûre d‘avoir un emploi dans sa nouvelle ville. Elle demande alors à l’Assédic, devenue Pôle Emploi, sa mutation. Après l’avoir obtenue, la quadragénaire emménage à Villeurbanne en septembre 2013. Pour Gilles, son futur-ex entraîneur, cette décision est difficile à accepter : « Ça a été un choc. Je lui ai mis l’épée entre les mains, ca fait toujours quelque chose à un maître d’arme de perdre l’un de ses tireurs. »

 

 

Les premiers mois, Cécile a du mal à s’adapter et à rencontrer de nouvelles personnes. Mais une fois encore, c’est grâce à l’escrime que la situation va s’améliorer. Rapidement, elle se fond dans le collectif de son club, où elle est très appréciée, comme en témoigne Circee Peloux, sa partenaire
d’entraînement : « C’est un pilier, on peut toujours compter sur elle. Ses conseils sont très précieux ». Même chose du côté de Pôle Emploi : « Elle s’est très vite sentie à l’aise, elle a un super esprit d’équipe et elle bosse efficacement » ajoute Nathalie Moreaux, l’une de ses collègues.

 

 

La jeune femme se sent enfin comme chez elle à Lyon. Tous les éléments sont donc réunis pour préparer au mieux Rio, et ainsi viser une médaille. Mais en février 2015, lors d’un transfert entre son lit et son fauteuil roulant, Cécile se blesse à la main. Un bout de cartilage se déplace, et les ligaments sont touchés. Jusqu’aux Jeux, où elle parvient tout de même à se qualifier, elle traîne cette blessure qui l’empêche d’arriver en confiance. L’aventure tourne court. Huit combats (quatre à l’épée, quatre au fleuret), huit défaites.
Au-delà de cette désillusion, une chose lui fait presque plus mal encore : ne pas avoir disputer la compétition par équipes. « Je pense encore aujourd’hui qu’on avait le niveau, mais la fédération n’a pas voulu nous
aligner »
, regrette-t-elle. Cette Paralympiade sonne comme un gros échec :« J’avais l’impression d’avoir déçu tous les gens qui croyaient en moi. J'étais triste pour mes partenaires, on méritait d’avoir notre
chance. »  
À ses parents qui viennent la chercher à l’aéroport, l'escrimeuse confie : « C’est terminé,
j’arrête. »

 

 

Ce n’est pas aussi simple. Cécile est en réalité incapable de mettre un terme sa carrière. « C’est une battante, elle déteste perdre. Là, elle reste sur une déconvenue à Rio. Je pense que c’est insupportable pour elle », précise sa mère. La principale intéressée confirme, elle veut laver l’affront en goûtant à nouveau à la victoire sur une grande compétition internationale. Mais avec le temps, ses blessures sont de plus en plus récurrentes. Aujourd’hui, son corps dit stop, mais sa tête veut continuer. « Le sport, c’est ma vie, il a été salutaire pour moi. L’escrime me fait mal, mais ces douleurs me permettent en quelque sorte d’oublier celles de ma maladie. Quand j’arrêterai, ce ne sera plus le cas et ça me fait peur. Je ne veux pas y penser », confie-t-elle.

 

 

Alors Cécile continue de s’entraîner, sans penser à demain. Son entraîneur la définit comme une athlète imprévisible : « Elle répond toujours présente là où on ne l’attend pas… » Et si c’était aux Jeux de Tokyo, en 2020 ? Le rendez-vous est pris.

 

 

LaDescenteAuxEnfers
Entraînement

LE SPORT
À TOUT PRIX

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8h-17h : travail

8h-17h : travail

17h30-18h : kiné

8h-17h : travail

19h30-21h :
entraînement

15h-15h30 : kiné

19h-21h30 :
entraînement
avec les valides

repos ou compétition

LA DESCENTE AUX ENFERS

Denise et Michel, les parents de Cécile. Cliquez pour écouter

© AH

© FFH

Grâce aux compétitions internationales, Cécile a eu l'occasion de se rendre dans de très nombreux pays.
 

QUAND TU

TE RETROUVES EN FAUTEUIL, TU DOIS FAIRE LE DEUIL DE TES JAMBES

«

»

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Cécile intègre l'équipe de France d'escrime en 2010

© FFH

13h-14h : leçon individuelle

15h-17h : préparation physique
19h-21h : entraînement
avec les valides

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Dans le cas de Cécile, en 2003, elle est considérée comme tel car elle tire avec sa main gauche, qui n'est pas sa main de prédilection

Tétraplégique

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Catégorie A

Paraplégique

En 2007, Cécile passe en catégorie B grâce à ses résultats en tant que gauchère et ses séances de botox à la main droite, qui lui permettent de retrouver sa mobilité

Abbdominaux ou moelle épinière touchés, pas d'équilibre du tronc

Texte et photos par Antonin Lhuillier © 2017

3 CATÉGORIES
D'ESCRIME SELON LE HANDICAP

Les zones coloriées correspondent aux parties du corps invalides.
Survolez pour plus de détails

C

A

B

À sa sortie de l’hôpital, en 2001, Cécile réalise qu’elle ne peut plus rien faire seule. Triste sort pour celle qui aimait être indépendante. Ses journées se résument à des séances de kiné et quelques sorties en ville. Elle essaye tant bien que mal de reprendre le tennis de table, en vain. « C’était trop frustrant, je suis droitière mais je ne pouvais plus tenir ma raquette de la bonne main. Il y avait un monde entre mon niveau et celui que j’avais avant d’être en fauteuil », regrette-t-elle. La jeune femme passe alors beaucoup de temps à l’Association des Paralysés de France (APF) qui organise de nombreuses activités tout au long de l’année.

 

 

C’est dans ce cadre qu’elle participe à une initiation à l’escrime handisport. Sa main droite paralysée, elle apprend à tirer de la main gauche. Celui qui va devenir son entraîneur et mentor, Gilles Bourret, se rappelle très bien de cette première rencontre : « Ce que je lui demandais, elle arrivait à le réaliser. Elle comprenait très rapidement comment attaquer, comment se défendre. J’ai très vite senti son potentiel. » Séduite par la discipline qu’elle vient de découvrir, Cécile prend une licence dans le club du Plessis-Bouchard (Val d’Oise), où Gilles a monté une section handisport. Elle choisit de pratiquer l'épée et le fleuret. « Je voyais le sport comme un moyen de rencontrer du monde, de sortir et d’exister socialement. J’avais aussi l’espoir de récupérer l’usage de certaines parties de mon corps », confie-t-elle.

 

 

Plus le temps passe, et plus l’escrime lui plaît. Son niveau est très bon, à tel point que la jeune femme participe, en 2003, à ses premiers Championnats de France avec la catégorie C, celle des tétraplégiques.
Et sur le plan professionnel, la situation évolue enfin. Après plusieurs refus, Cécile obtient la reconnaissance de sa qualité de travailleuse handicapée (RQTH).
Elle peut alors travailler de nouveau et son diplôme d’éducatrice spécialisée lui permet ainsi d'encadrer certains séjours organisés par l'APF.

 

 

L’année 2007 est cruciale. Grâce à ses résultats et à une évolution "positive" de sa maladie, Cécile passe en catégorie B, et réussit à être sélectionnée pour sa première étape de Coupe du Monde. Elle prépare et obtient également son diplôme d’entraîneuse. Quelques mois plus tard, son club reçoit un coup de fil de l’Assédic. « L’association cherchait une personne handicapée pratiquant le sport, parce qu’on est considéré comme autonome. Ce n’était pas le boulot de ma vie, mais au moins, ça me permettait d’avoir un rôle dans la société. C’était indispensable pour moi », reconnaît-elle. Cécile signe alors un CDI en tant que conseillère indemnisation. Un vrai soulagement.
« Je touchais une pension d’invalidité, mais je tenais à travailler à côté. Cet argent qui tombait de l’État, je n’avais pas l’impression de le mériter. » Mais lorsque la jeune femme reçoit son avis d’imposition, la note est salée. En travaillant à 90%, elle n’a plus droit à son aide financière et doit en plus payer des impôts. Elle décide donc de faire un avenant à son contrat et passe à 60% pour ne plus être imposable et toucher à nouveau sa pension. Ses trois jours de libre lui permettent surtout d’aller à l’entraînement plus régulièrement.
Le compromis est trouvé.

 

 

Quelques mois plus tard, Cécile choisit pourtant de se couper du monde de l’escrime. « En 2008, elle en a eu assez. Elle faisait énormément d’efforts, mais dans le système fédéral, on ne la voyait pas comme quelqu’un qui allait réussir. Ca l’a stoppé dans son élan, elle n’avait plus envie », résume son coach. Dans le même temps, son aventure avec Éric, devenu trop étouffant, prend fin. Mais encore une fois, un coup du sort va changer son destin. En 2010, les Championnats du Monde ont lieu à Paris, et il manque une athlète à la délégation française pour pouvoir s’aligner sur la compétition par équipes. La fédération fait alors appel à Cécile. À partir de là, tout s’accélère. Elle enchaîne avec les Championnats d’Europe en 2011, médaille d’agent à la clé, et décroche ses premiers titres de Championne de France tout en marquant des points sur le circuit mondial.

 

 

En 2012, la nouvelle tombe. En étant parmi les douze meilleures tireuses du monde, la jeune femme est sélectionnée à l’épée pour les Jeux Paralympiques de Londres. « Une joie indescriptible ! Il m’a fallu du temps pour réaliser », raconte-t-elle. Elle discute alors avec son entraîneur de ses ambitions. « On s’était fixé un seul objectif : sortir des poules », précise Gilles. Après une cérémonie d’ouverture riche en émotions, Cécile attaque la compétition. La journée passe et pendant le dernier combat, son coach prend conscience que la qualification va se jouer à la différence de points. Il la regarde, et lui fait le signe "deux" avec sa main : « Deux touches et tu es en quarts de finale ». La tension est palpable, mais sa protégée finit par marquer ces deux points indispensables. « J'ai ensuite perdu contre une Allemande, mais j'avais réussi mon pari », confie-t-elle. Il lui reste alors une chance de faire mieux, grâce à la compétition par équipes. Les Françaises parviennent à sortir de leur groupe mais s’inclinent face aux Hongroises aux portes des demi-finales. Malgré tout, Cécile n’a pas de regret : « Ces Jeux resteront gravés dans ma mémoire à tout jamais. »

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